« Nos maîtres mots de l’année seront, pour les jugements : efficacité, qualité, impartialité ; pour les justiciables : prévention, conciliation, bienveillance ; pour les juges : formation, humilité, indépendance. » En prenant ses fonctions de président du tribunal de commerce de Toulon, Patrick Romagnoli a donné le ton pour 2023 et globalement pour sa mandature, considérant deux axes à développer : les Modes alternatifs de règlement des différends (MARD), afin d’essayer de mieux respecter le temps de l’entreprise pour rendre une justice de qualité, et la prévention des difficultés des entreprises afin d’agir avant qu’il ne soit trop tard. Une vaste campagne de sensibilisation va pour cela être déployée, en lien avec nombre de partenaires économiques, Union patronale du Var, Chambre de commerce et d’industrie (CCI) du Var, Barreau de Toulon, Ordre des experts-comptables, entre autres.
Tribunal de commerce de Toulon : Patrick Romagnoli, président engagé
La démarche (lui) apparaît d’autant plus indispensable que l’année pourrait être tendue en termes de défaillances au regard de l’augmentation des ouvertures de procédures depuis le troisième trimestre 2022, après un fort ralentissement sur la période Covid 2020/2021 et une partie de l’an dernier. Si le « quoi qu’il en coûte » a pleinement joué son effet, avec les PGE (Prêts garantis par l’Etat), aides de l’Etat, moratoires Urssaf… l’addition risque d’être lourde conjointement au ralentissement de la croissance, à la crise énergétique, à l’inflation.
Quelques illustrations des craintes à la lecture de certaines données sur l’année écoulée : remontée des procédures collectives à 450 contre 300 en 2021 (loin encore du niveau de 2018, 542 procédures) ; 113 ouvertures en redressement judiciaire contre 95 en 2021 (175 en 2018) ; 314 ouvertures en liquidation judiciaire directe contre 198 en 2021 (350 en 2018) ; 15 ouvertures de sauvegarde contre 7 en 2021 (14 en 2018). En outre, il a été rendu 3 608 ordonnances de juge commissaire contre 3 380 en 2021 et 5 234 en 2018.
L’amiable en question
Il n’y a pas pour autant de vague de faillites à attendre selon le vice-procureur de la République Antoine Barat, qui a installé en début de séance les 31 juges élus le 25 octobre dernier, souscrivant totalement à l’exigence de prévention et à l’efficience des procédures amiables. Près de 8 entreprises sur 10 qui choisissent cette option ne connaîtraient pas de faillite. A défaut de vaccin, la justice économique doit être le remède pour sauver le plus de chefs d’entreprise en difficulté, a-t-il notamment prôné.
Des vertus de l’amiable que Madame le bâtonnier de l’ordre des avocats de Toulon, Sophie Caïs, veut bien faire siennes, mais dans une certaine mesure que l’on peut résumer par « concilier mais pas que… », défendant le rôle essentiel du droit, en particulier latin. Attention dans ce contexte à trop vouloir passer en force en imposant les MARD coûte que coûte alors que nous n’avons pas la culture de l’amiable, plus anglo-saxone.
« Je nous souhaite à tous de trouver la force d’œuvrer en gardant à l’esprit qu’être au service sera toujours la meilleure façon de changer le monde et probablement la seule qui permette de le changer durablement », a pour sa part conclu le président Romagnoli.