Les Publications commerciales : Pourriez vous nous rappeler la genèse d'Arpej ?
Anne Gobin : Cette association de type loi 1901 a été créée il y a 34 ans car le conservatoire de musique et de danse de Paris a sollicité en 1989 un bailleur social, SCIC, devenu CDC Habitat, pour procéder à la construction de logements pour les étudiants. Une association ad hoc appelée Arpej (Association de Résidence Pour les étudiants et les Jeunes) est ainsi née. Cet acronyme collait avec le fait que le conservatoire avait réellement besoin d'une construction pour loger ses étudiants. Dès lors, deux résidences ont été construites avec un bail emphytéotique. Le conseil d'administration s'est dit alors que cette compétence était transposable.
Combien de résidences ont-elles été construites à ce jour ?
Ce sont 86 résidences qui ont été érigées par 27 propriétaires différents. Les résidents sont locataires de ces appartements. 85 des 86 résidences sont conventionnées avec l’État, cela permettant aux jeunes de bénéficier de l'APL. 75 sont situées en Île-de-France et onze sur le territoire national à savoir Brest, Rennes, Metz, Oullins, à proximité de Lyon, Grenoble, Chambéry, Villeneuve d'Ascq et Marseille.
Quel est votre projet associatif ?
Notre premier projet validé par notre Assemblée générale en décembre 2018 repose sur trois axes majeurs à savoir la croissance, l'innovation et la diversification. Notre objectif est ainsi de proposer 700 nouveaux logements par an. La diversification géographique tient du fait que nous désirons répondre aux besoins de tous les jeunes sur un marché en tension. Notre projet actuel reprend les axes croissance et innovation auxquels ont été rajoutés deux axes l'accompagnement et la décarbonation.
Pourquoi avoir attendu si longtemps pour proposer des logements dans le Sud de la France ?
C'est le fruit de l'histoire. Nous étions en Île-de-France. Entre notre volonté de nous implanter en région, les premières propositions des bailleurs sociaux et la construction de logements, cela prend du temps. Cela va être en partie comblé puisque la résidence Canissat de 114 logements a ouvert cet été dans le 10e arrondissement de Marseille, à proximité de la Timone. Il y a 111 studios de 19 à 25 mètres et 3 T2 de 42 m2. Le prix de la redevance oscille de 483 à 583 € pour un studio et il est de 753€ pour un T2.
Vous ne vous arrêtez pas là. Vous avez même d'autres projets à Marseille, il me semble ?
Effectivement, nous avons deux résidences en projet avec 354 logements dans les trois prochaines années. La première est prévue pour 2025 dans le 2e arrondissement, rue de la République avec 87 logements pour 107 places afin d'accueillir des jeunes actifs et des étudiants. La seconde prévue en 2026 sera une résidence universitaire sur Euroméditerranée avec 153 logements pour 153 places.
Et dans la région, qu'en sera-t-il ?
Nous avons encore dix projets actifs proposés par des bailleurs sur Marseille pour 853 logements. Ces projets ont déjà été présentés au bureau du conseil d'administration de l'association. L'Arpej est prête à partir. Cela ne garantit pas pour autant que toutes les opérations "iront au bout".
De plus, nous avons plusieurs opérations dans les Bouches-du-Rhône, à Aubagne, Plan-de-Cuques, Bouc Bel Air, Istres et Miramas. Nous avons aussi un projet de 93 logements à Toulon. Enfin, nous avons quatre projets dans les Alpes Maritimes, deux à Biot, un à Antibes et un à Nice.
Aujourd'hui, dans un contexte inflationniste, la population jeune a de plus en plus de mal à se loger. L'accès au logement n'est-t-il pas devenu un enjeu social ?
C'est évident. L'enjeu l'est devenu depuis fort longtemps et continue de s'exacerber. Il y a plus de demandes que d'offres. Le développement de l'offre n'est pas suffisant pour absorber la forte demande. Un de nos enjeux est d'offrir des logements de qualité, fonctionnels, à un coût abordable. Nous accueillons tout type de public, français ou étranger, notamment des boursiers. Le niveau de redevance est compatible avec le budget. Les boursiers ont une APL majorée.
Vous apportez un soutien multiple aux locataires. Pourriez-vous nous le préciser ?
Dans un tel contexte économique, l'Arpej soutient les locataires. Cette année, 5 089 jeunes ont bénéficié d'un accompagnement (finance, santé, isolement). Ce sont 610 repas qui ont été donnés et plus de 1 000 colis (alimentaire, produits d'hygiène ) qui ont été octroyés. Pendant la Covid, l'Arpej a distribué 20 000 repas.
Quelle est la stratégie du groupe ?
La mission d'Arpej est outre de loger les jeunes, de créer du lien social entre eux, de veiller au bien-être des résidents et de les accompagner dans leur vie future. Il faut avoir en tête que les jeunes sont tous différents. La moyenne d'âge est de 24 ans sur les 13 200 locataires. 7 % ont plus de 30 ans. Mais pour la majeure partie, ils n'ont potentiellement pas de vie passée en logement autonome.
Nous proposons des logements pratiques et fonctionnels mais aussi propres à ce que les jeunes puissent prendre des repères. Notre but est que les jeunes bénéficient d'un logement en toute autonomie et puissent avoir des espaces collectifs dans lesquels ils peuvent s'épanouir.
C'est vraiment votre marque de fabrique ?
Notre proposition comprend deux types de salle, "life place", une salle de convivialité permettant de se retrouver et "workplace", une salle d'étude ou de travail pour des travaux de groupe. Cela nous semble très important. Il y a pour nous un constat suivant : les jeunes sont hyperconnectés mais en fait terriblement seuls. Ces espaces doivent créer du lien, des possibilités de se retrouver.
Mais notre volonté dépasse les simples espaces collectifs. Des collaborateurs sont à l'écoute des jeunes au sein des résidences et nous organisons in situ des événements. Ce sont des moments d’échange et de partage comme les Welcome Days. En fonction des lieux, nous avons des ruches et des jardins partagés. Nous nouons des partenariats pour les accompagner en matière de santé, d'autonomie, d'épanouissement personnel et de vie citoyenne. Outre les actions collectives, ceux qui le souhaitent bénéficient d'un accompagnement social individuel car nous avons onze collaborateurs qui sont des travailleurs sociaux diplômés d’État