Lors de son assemblée générale organisée dans ses locaux provisoires d’Agroparc, à Avignon, la FBTP 84 a réuni l’ensemble de ses adhérents pour interpeler les élus locaux et nationaux sur la situation difficile rencontrée par la profession. « La filière souffre d’une baisse de la commande des communes, d’une réduction de la mise en chantier des logements et fait face à une hausse de ses charges causée par l’inflation », insiste Daniel Léonard, président de la FBTP 84.
« Depuis 10 mois, l’ensemble de la profession travaille sur des propositions auprès du gouvernement, ajoute Frédéric Saintagne, président départemental de la Fédération Française du bâtiment. Les dernières déclarations de la Première ministre montrent que nous n’avons pas été entendus. Face à la situation qui s’annonce, nous proposions un rétablissement du PTZ sur le neuf à 40 % en zones B2 et C, et la relance d’un Pinel puissant comme en 2022. Nous nous attendons à une baisse de 20 % de la création de logements dans le département. Le Vaucluse produit annuellement 1 800 unités en collectifs et 1 200 unités en individuels en moyenne. Pour la construction de maisons neuves, nous nous attendons à une chute de 30 % des constructions. La hausse des taux provoque un refus de 40 % des prêts bancaires. Un ménage qui empruntait 270 000 € en janvier dernier à 1,1 % ne pourra, à la fin de l’année, contracter, avec le même niveau de revenus, que 190 000 €. Nous assistons à la disparition du marché des primo-accédants dans notre département qui ne dispose pas de la même clientèle, plus aisée, que dans le reste de la région ».
« La construction représente 1 200 emplois dont une partie est en sursis aujourd’hui. » Daniel Léonard ajoute que pour le logement collectif, « les chantiers mettent trois ans à sortir. Entre-temps, l’inflation est passée par là. Nous sommes engagés par les prix de départ. Impossible, alors, pour nous, de demander au promoteur des réajustements alors que leurs prix, auprès de leurs clients, ne sont pas révisables. Nous devons, alors, rogner sur nos marges », explique-t-il face à une inflation de 6 %, chiffres de l’Observatoire des Matériaux en main.
ZAN
La formidable manne des 423 M€ investis par l’Anru sur Avignon et 113 M€ sur Cavaillon devrait servir d’amortisseur. « Les chantiers tardent à démarrer, regrette Emilie Feral, présidente de la section gros œuvre. Les bailleurs sociaux se heurtent à la lenteur de certains locataires difficiles à reloger. Cette inertie risque, à terme, à ce que certains budgets ne soient plus disponibles ». Emilie Feral souligne également les effets de la loi ZAN (Zéro artificialisation nette).
« Certains maires deviennent très attentistes de peur de ne pas pouvoir délivrer de permis de construire. Nous voyons déjà certains terrains constructibles redevenir agricoles. »
Conscient de la lutte contre l’artificialisation, Frédéric Saintagne souligne l’énorme potentiel pour construire aujourd’hui dans les nombreuses dents creuses urbaines et sur le potentiel offert par les friches industrielles.
Bloc communal
Denis Mathelin, président de la section TP, souligne les efforts du Département de Vaucluse pour soutenir l’activité et encaisser l’inflation.
« Par contre, nous assistons à une baisse de la commande de la plupart des municipalités et groupement de communes. Nous lançons un appel aux maires pour qu’ils poursuivent leurs efforts ! »
Daniel Léonard reconnait leurs difficultés causées par la baisse de certains financements vers les collectivités locales. Denis Mathelin souligne, en cette période de rareté de la ressource en eau, l’impérieuse nécessité de s’attaquer aux 20 % de déperditions des réseaux d’adduction conçus pour une durée de 80 ans et qui accusent, aujourd’hui, un siècle d’ancienneté.
Recyclage
L’ensemble du bureau de la FBTP 84 soutient les mesures environnementales comme l’écotaxe pour financer le recyclage. Les représentants de la profession rappellent leurs efforts pour trier les matériaux, regrettent que l’écotaxe ne finance que l’enlèvement des matériaux bien triés mais pas leur transport et soulignent que le système se grippe car le département ne dispose pas d’une déchetterie pour les professionnels. Sur ce plan, la Fédération fait appel au Grand Avignon pour trouver une solution. Daniel Léonard évoque également le coût supplémentaire de stockage de certains matériaux recyclés dans des locaux couverts.
Défaillances
Résultat, la Fédération du BTP de Vaucluse s’inquiète des très mauvais scoring des entreprises du BTP par les services de la Banque de France. « Nous nous attendons à des défaillances parmi les 117 entreprises du département », estime Emilie Feral. « A mars, sous les douze derniers mois glissants, nous constatons une baisse de 10 % à 12 % des effectifs atténuée par des départs en retraite, constate Daniel Léonard. Ce n’est qu’une satisfaction à courte vue car nous perdons de la compétence dans nos entreprises, qui est difficile à reconstituer en raison des fortes tensions sur le marché du travail. La Fédération lutte contre la solitude du chef d’entreprise dans ses moments difficiles grâce à ses services ».
Emilie Feral compte mettre à profit les périodes de chômage technique à la formation sur la mutation technologique et appelle ses confrères à travailler sur des solutions de mutualisation des process et des outils pour relever l’important chantier de la rénovation énergétique.
En chiffres :
La situation dans le Vaucluse :
Maison individuelle : -30 %
Non résidentiel neuf : -14 %
Bâtiments tertiaires : +7 %
Amélioration entretien : +1,4 %
Coûts de production : +9,4 %