AccueilTerritoiresCarnoules : ils veulent sauver le train touristique du Centre-Var

Carnoules : ils veulent sauver le train touristique du Centre-Var

L’Association du train touristique du Centre-Var (ATTCV) est engagée dans la sauvegarde du patrimoine ferroviaire sur la ligne Carnoules-Brignoles, élargie jusqu'à Saint-Maximin. L'objectif est de refaire rouler un train touristique.
De gauche à droite, Olivier Teisseire, Jean-Louis Bourrel, Bernard Couzot, Julien Vincent et Michel Rémy.
O. Réal - De gauche à droite, Olivier Teisseire, Jean-Louis Bourrel, Bernard Couzot, Julien Vincent et Michel Rémy.

TerritoiresVar Publié le ,

Et si la ligne de chemin de fer Carnoules-Brignoles fonctionnait à nouveau ? Et si le train allait jusqu'à Saint-Maximin ? Dans cet état d'esprit, l’Association du train touristique du Centre-Var, reconnue d’intérêt général, œuvre depuis près de 30 ans à la sauvegarde d’un patrimoine ferroviaire exceptionnel qui existe depuis 1868 et dispose également de pièces uniques, toutes en état de marche (voir encadré). L'objectif de l'association est de faire rouler des trains (touristiques) sur la ligne Carnoules-Brignoles, élargie jusqu’à Saint-Maximin. Soit un tronçon initial de 24 km, avec arrêt en gare de Sainte-Anastasie, prolongé de 18 km.


Conduite par un noyau dur de bénévoles passionnés et passionnants, elle fait partie de la sérieuse Union des exploitants de chemins de fer touristiques et de musées (Unecto), fédération placée sous l’égide du ministère de la Transition écologique chargé des Transports, qui rassemble 100 unités en France, 1 200 km de voies ferrées sur des parcours moyens de 15 à 20 km, 300 locomotives, 3,7 millions d’entrées payantes annuelles, 800 emplois… L’ATTCV représente fièrement la région Provence-Alpes-Côte d’Azur, en empruntant pour effectuer son parcours la ligne à voie unique Carnoules-Gardanne.

Recherche collectivité référente

Tout allait bien dans le meilleur de ce monde ferroviaire particulier jusqu’au non-renouvellement en décembre 2021 de la convention d’exploitation par la SNCF en raison « d’un changement de réglementation concernant les trains touristiques », explique le président de l’association Julien Vincent (qui travaille lui-même à la SNCF). Il faut désormais qu’une collectivité territoriale - commune, Etablissement public de coopération intercommunale (EPCI), Département, Région - demande un transfert de gestion du domaine public de la ligne auprès de SNCF Réseau, qui est propriétaire de la voie, et en confie l’exploitation à l’association.


Une sorte de principe de précaution et de couverture par les assurances au cas où un train déraillerait ou un avion se jetterait sur la voie (autre forme de déraillement…). En outre, après audit de l’état du réseau, ce dernier est en bon état mais nécessite des travaux de remise en conformité pour une reprise d’activité de l’ordre de 400 000 euros, que la Région « serait prête à financer à 75 %. Cela constituerait un reste à charge très faible pour la collectivité locale qui prendrait cette nouvelle responsabilité, la Région préférant s’inscrire en complément d’un des EPCI du parcours, en l’occurrence Provence Verte ou Cœur du Var, voire du Département », expliquent en forme de vœux le président et ses fidèles compagnons de route.

Les trains et wagons historiques de l’association sont situés au dépôt de Besse-sur-Issole. (Crédit : O. Réal)

Plus de 150 000 personnes baladées

Ce wagon de tête(s) justement, en quête d’un partenaire public locomotive, rassemble une soixantaine d’adhérents, dont une vingtaine d’actifs, qui sont le cœur de cette exploitation et permettent un modèle économique équilibré, hors travaux évoqués. Il s’agit de perpétuer l’engagement en 1994 d’une poignée « d’hurluberlus » qui ont bataillé durant sept ans avant d’avoir l’autorisation de circuler sur Carnoules/Brignoles. C’était en août 2001, embarquant les premiers voyageurs dans l’autorail Picasso qui est la propriété de l’association, comme nombre d’autres équipements constituant l’impressionnant parc maison.

Sur un peu moins de deux décennies d’exploitation (statistiques depuis 2003), le président Julien Vincent a comptabilisé 1 122 jours de circulation en trains réguliers sur cette ligne, 420 en trains de groupes, essentiellement le dimanche, entre Pâques et la Toussaint, le mercredi et le dimanche en juillet-août. En outre, depuis 2008, l’association a enregistré 66 jours de circulation sur le réseau SNCF classique, pour aller à des festivals nationaux de trains anciens, des évènements varois et régionaux, ou pour participer à des missions de solidarité dans la vallée de la Roya…


Ainsi, 157 672 personnes ont été transportées sur le tronçon de prédilection, et 457 de Brignoles à Saint-Maximin. Les bonnes années peuvent atteindre 6 000 voyageurs, soit 12 000 trajets en décompte SNCF si l’on considère qu’il s’agit d’allers-retours. Durant les deux/trois années précédant la Covid, la fréquentation a été consolidée, boostée même, par les trains à thème. Le train du père Noël, en décembre, a ouvert la série, puis il y a eu le train d’Halloween avec soirée dansante à bord, le train de Pâques incluant la chasse aux œufs, le train de la Saint-Patrick rythmé par un groupe de musique… Le tout pour la modique somme de 10 euros par personne, comprenant des petits cadeaux pour les enfants sur le parcours de Noël. Ces rentrées associées au bénévolat, et au mécénat défiscalisé compte tenu de la reconnaissance d’intérêt général, permettent de couvrir la maintenance des engins et en partie de la voie, sauf gros travaux. Pas de subventions d’exploitation, hormis des fonds de développement de la vie associative octroyés par l’Etat il y a trois ans, grâce à l’intervention de la députée de la circonscription de l’époque.

Allège postale de 1930, wagon à fourrage de 1914, wagon citerne de la Marine nationale… les joyaux de la collection sont très rares. (Crédit : O. Réal)

Outil au service du territoire

Même si le modèle tient sans charges majeures, des pistes sont à la réflexion pour améliorer la prospection touristique et la capacité financière. Par exemple un wagon avec restauration, à l’image de ce qui se pratique avec grand succès dans d’autres trains touristiques du réseau national, un train Bacchus pour amener les gens vers la manifestation phare éponyme à Toulon, un train vers la Foire de Brignoles... Autres éventualités, acheter un vélo rail, attraction pour quatre personnes très prisée également, ou ouvrir les trains aux mariages. Mais la meilleure piste est le train lui-même, en même temps que la meilleure destination est le parcours sur l’ensemble de la ligne Carnoules-Saint-Maximin, à quelque 30 km/heure. Une balade unique, avec arrêt pique-nique à Saint-Anastasie, visite du musée des Gueules Rouges à Tourves, découverte de la basilique de Saint-Maximin, bercée par des paysages divers et variés, des vignes à la forêt pour déboucher sur la Sainte Baume.


« Notre association est un outil au service du territoire », plaident avec force de conviction le président et ses collègues. « C’est une véritable colonne vertébrale touristique qui peut amener des gens du littoral vers un autre Var que l’on aime et créer des synergies avec des acteurs économiques locaux, notamment les restaurateurs et les commerçants. » Une valeur ajoutée pour l’attractivité du territoire et l’économie en général, qui rapporte directement ou indirectement et que les élus des petites villes du parcours appellent de leurs vœux, mais en vain pour l’instant, ou ne le disant pas assez fort. Outre le fait qu’il constitue le seul train touristique à voie normale de la région, il présente conjointement des avantages circonstanciés en matière d’exploitation de fret au regard du coût de l’essence, ou d’évitement de norias de camions sur des chantiers spécifiques comme l’aqueduc de Flassans. Par ailleurs, toujours en quête de modernité et très soucieux de l’environnement, les chefs de file de l’ATTCV testent des biocarburants alternatifs sur leurs machines et examinent plusieurs solutions économes en CO2.

L’autorail Picasso, mis en circulation en 1956. (Crédit : O. Réal)

Zoom avant, moteur caméra

Reste que dans l’envers du décor une course contre la montre est engagée. Le temps qui passe sans rouler sur la voie remet en cause les possibilités de redémarrage de l’activité. La végétation ne tient pas compte des lenteurs administratives et autres hésitations des édiles locaux, elle pousse à un rythme soutenu et pour le coup ininterrompu depuis fin 2021. Si cela devait perdurer encore cette année et la suivante, les souches seraient tellement importantes qu’elles déformeraient la voie et rendraient toute reprise inenvisageable. Une nouvelle convention via une collectivité en 2023, et le plus tôt serait le mieux, permettrait de faire l’élagage de la ligne à temps et de renouer assurément avec le train de Noël.


Ce serait un cadeau pour les bénévoles, pour les voyageurs, pour les Varois, mais pas que..., et l’argument n’est pas de moindre importance dans le premier département touristique de l’Hexagone hors Ile-de-France. Tout ce matériel roulant est en effet aussi un spot vedette de tournages pour le cinéma et la télévision. Les équipes de « La fille du puisatier », avec Daniel Auteuil, du long feuilleton « Plus belle la vie », de la série « Riviera », de la chaîne Arte Allemagne, et bien d’autres, ont aimé le Var en prenant le train, et mis les lieux traversés sous les feux de la rampe. Cela rajoute à la popularité, à l’attrait et à l’économie du Var. La caméra est par conséquent désormais braquée vers les collectivités pour cheminer ou non vers un long métrage historique.

En parfait état de marche

Tout le matériel est en parfait état de marche. (Crédit : O. Réal)

« Tout est en très bon état, nous sommes une référence en la matière sur le plan national », affirme le vice-président Michel Rémy, en charge de la maintenance. Le « tout » en question est situé à Besse-sur-Issole, qui abrite le dépôt de l’ATTCV, site utilisé naguère pour le chargement des trains de marchandises transportant les vins rosés produits localement. Cela comprend notamment : deux engins uniques que sont la rame ETG mise en circulation en 1972 pour tester le système de motorisation équipant aujourd’hui tous les trains à grande vitesse, et le 4009 de la même époque, une Caravelle de 1966, un autorail Bleu d’Auvergne de 1958, un autorail Picasso de 1956, deux Draisines de 1965, une voiture couchette des années 60, un fourgon de queue de 1930, un wagon atelier de 1957, mais aussi, parmi les joyaux historiques, un wagon plat IIIe République de 1880 classé Monument historique, un wagon à fourrage de 1914 classé monument de France, un wagon citerne de la Marine nationale de 1933 qui a fait partie des dommages de guerre, donné par l’Allemagne suite à la Première Guerre mondiale, l’une des deux allèges postales d’origine en France de 1930, un wagon standard US acheté aux USA au lendemain de la Seconde Guerre mondiale…

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