Les Nouvelles Publications : Que pensez-vous de ce colloque organisé sur le thème de l'arbre au sein de cette journée Villes et villages fleuris ?
Benoit Campion : Je trouve très intéressant que la labellisation du fleurissement des villes et villages ne soit pas réduit au décorum mais soit bien un moyen de répondre aux enjeux du réchauffement climatique. Les arbres font partie intégrante du patrimoine urbain et sont sources de meilleure qualité de vie, de lutte contre les îlots de chaleurs… Ils sont de plus en plus utilisés pour adapter l'urbain au changement climatique.
Quelle est à présent la place de l'arbre dans la politique publique d’aménagement ?
J’ai pu observer en 25 ans de pratiques l'évolution de la place du végétal dans les projets urbains, qui n’a cessé d’augmenter, qu’il s’agisse des maîtrises d'œuvres d'aménagement d’espace public ou des projets de renouvellement urbain. Aujourd’hui, l'objectif est de planter le plus d'arbres possible même dans les contextes urbains les plus contraints, comme à Avignon sur l'axe historique Carnot-Carreterie, en cours de chantier. L'arbre n'est même plus un problème pour la valorisation du patrimoine bâti. Dans un autre registre, sur le projet de renouvellement urbain du quartier Arc-Sud à Manosque, premier NPNRU labelisé Quartier Durable Méditerranéen, l’ingénierie paysagère vient au cœur du renouvellement urbain.
Un budget "100 % vert" pour la Région Paca
Cela ne change-t-il pas totalement votre métier ?
Je suis architecte de formation et urbaniste de métier. L’école de pensée qui m’a formé et conditionné est le "spatialisme". On a longtemps assumé une certaine radicalité de l’aménagement, avec soit des places urbaines 100% minérales séparés d’autres espaces 100% végétalisés. A présent, avec le réchauffement climatique, la radicalité s’est inversée: il est difficile d’imaginer un aménagement d’espace public sans arbre.
Vous dites que planter dans les règles de l'art ne suffit plus ?
En effet, les dispositifs de sols innovants pour les plantations devraient devenir la règle. Nous avons des retours d'expériences comme par exemple le quartier de La Maille II à Miramas que j’ai réalisé il y a dix ans. Les arbres plantés classiquement ou même avec de larges noues souffrent trop avec les canicules d’aujourd’hui tandis que les dispositifs de "techno-sols", pour désimperméabiliser les sols, récupérer et stocker les eaux au profit de la croissance des arbres, cela marche.
Planter des arbres en milieu urbain n'est pourtant pas sans difficulté ?
Il y a en effet de très nombreuses contraintes et des coûts inhérents qui posent de nombreuses questions. Il y a aussi besoin de former les entreprises dans cette optique. Cela implique plus généralement une révision de la chaine de conception et de réalisation d'un projet urbain. Aujourd'hui, s'il n'y a pas de solution pour les réseaux enterrés, planter des arbres relève d'un tour de force !
Selon vous, quelles sont les études nécessaires pour mieux végétaliser les villes ?
La définition d’une stratégie globale est nécessaire pour définir les orientations de la place de la nature dans une ville. Nous avons la chance d’accompagner la Ville de Montpellier sur sa stratégie ville-nature. Tous les leviers sont recherchés pour favoriser les plantations, comme le secteur privé qui joue aussi un rôle majeur dans la végétalisation de la ville.
C'est donc une nouvelle stratégie qui se met en œuvre ?
Développer des planifications stratégiques est un impératif aujourd’hui pour traiter ensemble et de manière interdisciplinaire l’architecture, l’urbanisme, le paysage… Ce qui est important c’est que ces planifications aient véritablement une portée opérationnelle. Ces types de missions doivent se développer sur nos territoires pour favoriser la renaturation des villes.